Les maisons en pisé et galets roulés
Le village de Saint-Michel fait parti de cette région du Dauphiné aux maisons en pisé et aux murs de galets en épis.
Le territoire de Bièvre-Valloire est fortement pourvu en patrimoine bâti. L’originalité de son architecture traditionnelle en pisé et en galets roulés fait parti du charme de ces petits villages qui ont su conserver ce témoignage important du passé. Fondues dans le paysage ou modestement cachées sous un enduit de façade, ces constructions de terre crue s’offrent au regard et dévoilent leur charme discret.
LE PISÉ
Le pisé est une technique ancienne. En Isère, on trouve une grande quantité de bâtiments ruraux en pisé datant des XIIIe, XIXe et début du XXe siècle. Typiques de notre région, les maisons en pisé sont construites grâce à de la terre crue, qui est « banchée » c’est à dire mise en œuvre dans un coffrage qui permet son élévation. En Isère, seule la terre crue intervient dans la construction du mur en pisé. Ce type de construction est très présent sur la commune de saint-Michel où la plupart des maisons en pisé sont d’anciens bâtiments à usage agricole.
Il y a encore quelques décennies, les anciens se souvenaient de ces chargements de terre, pris dans les carrières et sur les champs par les futurs utilisateurs. Ils évoquaient avec précision le travail du maçon local, chargé des fondations et du soubassement en galets. Il supervisait les travaux avec la collaboration d’un charpentier chargé de la pose des portes, des fenêtres et de la toiture.
LES GALETS
Les galets roulés sont extraits des plaines et des rivières. Assemblés au mortier de chaux, ils servent à monter les soubassements des murs. Leur disposition en arête de poisson sur des rangées alternées d’une couche de tuiles absorbant l’humidité, donne aux bâtiment un cachet particulier.
Ce n’est qu’au-dessus de cette assise, qui atteint au moins un mètre, que le mur en pisé peut s’élever.
LA CONSTRUCTION
La terre est battue dans un coffrage en bois dont les parois exclusivement latérales – banches – sont retenues par des traverses et maintenues à l’écartement du mur par des serre-joints en tige filetée munie d’un écrou à manivelle. Certaines personnes en détiennent au moins un jeu de deux, et on fait appel à d’autres détenteurs pour monter une banchée sur toute une face de la maison. Les banches de 3 à 4 mètres de long et de 0,75 à 0,85 mètre de hauteur peuvent se fixer l’une à l’autre par des crochets.
L’entraide dans chaque village est fondamentale, et les bonnes volontés ne manquent pas. Huit personnes au moins doivent participer à chaque opération : quatre pour préparer la terre, deux pour la monter, deux autres pour la battre avec le pisoir, par couches de 10 à 15 centimètres. Il faut faire vite pour obtenir un mur homogène, et il est nécessaire d’attendre quelques jours avant de décoffrer et au moins une quinzaine avant de faire une nouvelle banchée au-dessus de la précédente.
Si la hauteur d’une banchée est exécutée dans la journée, il faut, pour élever une maison de 7 à 8 mètres de hauteur, environ 10 journées, chacune espacée de 15 jours, soit 4 à 5 mois, de préférence à la belle saison : la technique exclut pratiquement les équipes trop peu nombreuses. Le procédé paraît simple ; il faut cependant connaître la qualité de la terre à employer : forte et franche elle ne doit renfermer qu’une certaine proportion d’argile dont dépend toute la qualité du pisé
LE RÉSULTAT
Une des difficultés essentielles est le manque de résistance des Joints. On met une légère couche de chaux entre deux banchées successives, superposées ou jointives. Le mur, d’un beau jaune ocre, est rarement crépi. Dans ce cas, l’enduit est souvent peint avec des chaînes d’angle en fausse pierre apparente.
Après séchage superficiel, les parois sont enlevées, les traverses restant seules en place. Ainsi, on retrouve sur les murs des trous de quelques centimètres de diamètre, alignés de façon régulière en bas de chaque banchée, rebouchés ou non avec un mortier de chaux. Il s’agit des trous de « boulin » laissés par ces traverses en bois.
Bien protégé par un avant-toit d’une bonne largeur, ce mur en pisé pouvait défier le temps. Combien de reconstructions, agrandissements, surélévations ont repris l’ancien mur en pisé comme support ?
AUJOURD’HUI
Après la Seconde Guerre mondiale de nouveaux matériaux industriels sont apparus comme la brique, le béton armé ou le parpaing. En même temps, le dépeuplement des villages supprimait les relations d’entraide qui étaient nécessaires pour mener à bien ce genre de construction.
Les savoir-faire ont maintenant presque entièrement disparu en France, malgré un regain d’intérêt pour le matériau “terre” au bilan écologique important. En 1985, 65 logements HLM ont été construits en partie en pisé dans le Nord-Isère à Villefontaine.
Sources : L’architecture rurale française, Dauphiné, § 6.4.3 Un procédé de construction particulier : la construction en pisé banché, Henri Raulin, 1977 –
https://www.banquedesterritoires.fr, Habitat, Luc Blanchard, 13 février 2019
Banches : Planches de bois servant de coffrage. Banchée : contenu d’un coffrage.
Pisé : Le mot apparait pour la 1ère fois en 1562, du mot lyonnais poser, « broyer » ; latin pi(n)sare (Petit Robert, 1970). Mode de construction en terre crue.
Piseur : Ce terme d’argot désigne les ouvriers en train de construire un mur en terre crue ou mur “en pisé”.
Pisoir : Masse en bois dur pour battre la terre, le pisé.
Association Georges Antonin
L’association est née en 2001, de la volonté d’un groupe de passionnés des traditions locales, tous issus du milieu rural. Les deux initiateurs lui donnèrent le nom de « Georges Antonin » en hommage à leur père respectif Georges et Antonin, deux figures locales du milieu du 20e siècle. Georges est le patron de Saint-Geoirs et le Pays Antonin, tout proche, méritait bien un petit clin d’œil.
L’association ne représente pas un village en particulier, et est ouverte à toutes les personnes intéressées par la manière de vivre de nos anciens.
Son but :
- Conserver le patrimoine rural et artisanal.
- Acquérir et transmettre les traditions, les savoir-faire ancestraux et la mémoire des événements locaux.
- Participer à des manifestations et des actions inter générations.
Le savoir-faire d’autrefois : Les différentes étapes de la construction d’un mur en pisé. Association Georges Antonin.
Village de Brion, avril 2016.
Photos © Association Georges Antonin